02/12/2024

Atteinte à la vie privée et licéité de la preuve

Dans cet arrêt, une assistante commerciale est licenciée pour faute grave après avoir copié, sur plusieurs clés USB personnelles trouvées dans son bureau par l’employeur, de nombreux fichées de l’entreprises dont certains relatifs à des données de fabrication (informations auxquelles elle n’a normalement pas accès dans le cadre de ses fonctions).

 

La salariée conteste ainsi la licéité de la preuve : les clés USB utilisées étaient personnelles, et non connectées à l’ordinateur professionnel : l’employeur ne devrait donc pas pouvoir se baser dessus pour justifier son licenciement.

La Chambre Sociale de la Cour de Cassation confirme alors que l’accès par l’employeur, hors la présence du salarié, aux fichiers contenus dans des clés USB personnelles, qui ne sont pas connectées à l’ordinateur professionnel, constitue une atteinte à la vie privée du salarié : le moyen de preuve est donc illicite par principe.

Cependant, la Chambre recommande aux juges en présence d’une preuve illicite, de :

  • Se questionner : est-ce que l’employeur avait des raisons concrètes de justifier le recours à la surveillance et l’ampleur de celle-ci ?
  • Rechercher : n’y avait-il pas un autre moyen, plus respectueux de la vie personnelle du salarié, d’atteindre un résultat identique ?
  • Apprécier : l’atteinte à la vie privée est-elle proportionnelle au regard du but poursuivi ?

 Dans notre cas :

  • Il existait des raisons concrètes qui justifiaient le contrôle des clefs USB, en raison du comportement de la salariée : elle avait travaillé sur le poste informatique d’une collègue absente, imprimé de nombreux documents qu’elle avait rangé dans un sac plastique placé au pied de son bureau ou dans une armoire métallique fermée (selon le témoignage de deux collègues) ;
  • Les données récupérées ont été triées par un expert, en présence d’un huissier de justice : l’employeur s’est limité à produire des données strictement professionnelles. Il n’y avait donc pas de moyen plus respectueux de la vie professionnelle pour atteindre le même but ;
  • L’employeur avait agi pour préserver la confidentialité de ses affaires : l’atteinte était donc proportionnelle.

Cette décision s’ancre donc parfaitement dans la logique suivie par la Cour de Cassation depuis quelques années : les atteintes au droit à la vie privée peuvent être justifiées, lorsqu’elles sont mises en balance avec le droit à la preuve.

 

Cass. soc. 25-9-2024 no 23-13.992 FS-B, O. c/ Sté Verre équipements